Doutez-vous ?

Doutez-vous ? Je me le demande. Doutez-vous, vraiment ? À chaque instant, à tout bout de champ ? Ne sachant jamais assurément si vous êtes sur la bonne voie. Je l’ignore, et à vous voir passer devant moi d’un pas visiblement décidé, tandis que je reste assise sur ce banc, sensiblement flétrie, déjà, je dirais que non. En tout cas, pas à cet instant. Mais comment savoir ? Vous marchez prestement, allant de l’avant, persuadé de vous rendre là où vous êtes attendu, au moins par vous-même si ce n’est par un autre, ou bien par une énième tâche que vous seul saurez accomplir comme il se doit, ou encore par un tournant dans votre vie. Après tout, cela arrive, un tournant dans une vie. Pour autant, sait-on jamais le prévoir ? Je ne saurais le dire. Mais doutez-vous, un tant soit peu du bien fondé de ce pas qui s’enchaîne après l’autre pour vous mener où, en définitive ? Je l’ignore et je vous envie ! J’aime à penser que tout vous est agréable dans ce jardin public que vous traversez, flânant d’un œil, sans perdre votre chemin de l’autre, attentif au fil de votre pensée, que je préfère imaginer d’une clarté sans équivoque, telle que se reflétant sur votre visage d’une placidité déconcertante. Je vous envie. Vous êtes passé, tandis que j’hésite encore. J’aurais pu vous suivre, m’élancer dans vote sillage, me protégeant à l’ombre de vos certitudes. Je n’en fais rien. Je doute. Rester encore ?, me persuadant qu’il est doux de prendre son temps ou bien me tancer ?, car le temps presse, chacun le sait et il ne vaut rien de se voiler la face. J’hésite, je doute. Je vous envie et je vous plains. Vous êtes passé et rien n’a su vous retenir. Je cligne de l’œil, éblouie par un rai de lumière qui se fraie un chemin entre les branchages. Je sais à présent, j’hésite, je doute, mais je reprendrais bien un peu de ce paysage, en attendant.