De violentes rafales de pluie venues s’écraser contre les vitres, m’ont réveillée en sursaut aux alentours de 5h du matin. Trempée de sueur, suffoquant dans la moiteur de la pièce, je me suis pourtant félicitée d’avoir fermé toutes les fenêtres pour empêcher les moustiques d’entrer la veille au soir. Au moins, je nous avais évité une inondation. Je me suis levée sans bruit, pour ne pas réveiller Paul qui ronflait paisiblement. J’ai enfilé son t-shirt qui traînait par terre. En traversant le salon, je me suis aperçue que des éclairs zébraient le ciel, suffisamment loin pour qu’aucun coup de tonnerre ne nous parvienne. Je me suis attardée quelques minutes, fascinée par le spectacle, mais l’atmosphère était tellement irrespirable que j’ai dû sortir de ma contemplation pour me diriger vers la porte d’entrée. Après l’avoir entrouverte prudemment, j’ai été soulagée de constater que la marquise qui surmonte la porte avait ménagé un abri suffisant pour que je puisse laisser ouvert en grand, le temps d’aérer un peu. Je me suis glissée à l’extérieur et j’ai passé un long moment à regarder la pluie tomber. Le ciel était indescriptible, agité de masses sombres s’entrechoquant. C’était un plaisir que de frissonner dans la fraîcheur de la nuit, après ces longues journées caniculaires. Quand la pluie s’est calmée, je suis rentrée. L’air était toujours irrespirable, mais j’avais encore sommeil. J’ai ouvert la fenêtre de la cuisine qui donne sur l’évier. Je suis passée par la salle de bain, pour me rafraîchir le visage, seulement quand je me suis vue dans le miroir, j’ai eu peur. C’était bien la peine d’avoir dormi dans une cocotte-minute. J’avais trois gigantesques marques rouges sur le front et deux dans le cou. Alors que je ne les avais pas senties jusqu’à présent, elles m’ont démangée presque immédiatement. Je me suis examinée minutieusement, pour découvrir une dizaine d’autres piqueuses. J’ai attrapé l’huile essentielle de lavande pour en badigeonner chacune d’elles afin d’apaiser les démangeaisons.
Le reste de la nuit n’a pas été très agréable. J’ai alterné des temps de lecture et de somnolence agitée. Une piqure que je n’avais pas remarquée lors de mon inspection me gênait terriblement, mais je n’avais pas le courage de me relever pour aller chercher la lavande. Evidemment, j’ai fini par me rendormir, mais au moment où je dormais le plus profondément, Paul s’est levé. Malgré toutes ses précautions, la porte a grincé lugubrement lorsqu’il a voulu la refermer. Je me suis levée, résignée, épuisée. Nous avons tout ouvert, mais la chaleur accumulée à l’intérieur restait accrochée aux murs. J’ai regardé Paul, qui a hoché la tête sans que j’aie besoin de dire quoi que ce soit. Je l’ai laissé devant son petit déjeuner pour courir jusqu’à l’appentis, attraper mon vélo, un sac de plage sous le bras. Je me suis détendue au contact du sable sous mes pieds. Après m’être déshabillée en désordre tellement j’étais impatiente, je me suis précipitée vers le rivage. J’ai fait quelques pas dans l’eau, dont la fraîcheur m’a saisie. Alors que j’avançais, en m’aspergeant les bras, j’ai vu la première me passer devant, puis comme je balayais le fond du regard, une autre, puis deux, puis tout un tas de méduses qui allaient et venaient autour de moi. Je n’ai pas eu d’autre choix que de sortir de l’eau. J’allais remonter vers mes affaires, contrariée, quand j’ai senti le bouton que j’avais sur l’omoplate me picoter. J’ai serré les poings et puis j’en ai eu assez. Je me suis retournée et j’ai couru aussi vite que j’ai pu jusqu’à l’eau, puis dans l’eau, avant de me mettre à nager avidement. Je crois que j’ai réussi à faire abstraction des méduses durant quelques mouvements de brasse qui ont été merveilleusement délassants, seulement, lorsque je me suis décidée à regagner la plage, je n’ai plus vu qu’elles. Je me suis lancée dans un slalom absurde. Je pense que j’ai eu de la chance, je ne… Ah, le téléphone. Où est-il ? Punaise ! …. Allô ? Oui ? Allô ! Oui ! Comment vas-tu ?… Oui, très bien, merci. Oui, oui, tout est parfait. On en profite au maximum.