Elle serre les pots les uns contre les autres, la crassula près de l’oxalis. Le romarin est mal en point. Elle le pousse dans l’angle, derrière la verveine dont les premières feuilles sont d’un vert tendre. Elle les effleure de la main pour libérer cette odeur acidulée qu’elle aime tant. Elle bloque la porte avec le montant de la chaise longue qu’elle a tout juste la place de déplier. A peine deux mètres carrés de balcon, c’est exiguë, mais c’est déjà un petit bout d’extérieur. Elle se sait chanceuse. Elle s’installe, une tasse de tisane à la main. Les rayons de soleil de l’après-midi passent l’angle du mur pour venir lui mordre la peau. Elle inspire profondément, ferme les yeux. Ne seraient les quelques voitures qui circulent sur le boulevard et la sensation du béton sous ses pieds nus, elle pourrait se croire à la campagne. L’herbe haute lui chatouillerait les mollets à chaque mouvement que lui imprimerait la brise. A sa gauche, il y aurait un cerisier en fleurs, dont le parfum saturerait l’air. Un peu plus loin, un parterre d’aromatiques s’étendrait en pagaille. Le potager serait en attente des premiers semis. Un cabanon, peut-être, s’élèverait tout au fond du jardin. Ou bien non, une serre. Une serre ancienne aux montants métalliques. On y cultiverait des tomates, des poivrons, mais pour le moment, quelques plantes grasses se partageraient l’espace en attendant la saison. Au-delà, des champs à perte de vue, ou bien une forêt, peut-être des montagnes, l’océan ? Elle ne parvient pas à se décider.
Elle ouvre les yeux. La lumière l’éblouit. Ce qu’il fait chaud ! On se croirait sur une plage en plein été. Elle se demande même si elle n’est pas en train de prendre un coup de soleil. Ce serait un comble. Elle soupire en rentrant dans l’appartement. C’est quand même terrible de devoir s’enfermer par un temps pareil.